Jeanne SALOMON, née LEVY
écrite par Pierre Hahn, son petit neveu.
La dernière fois que j’ai vu ma grande tante, Jeanne Salomon, née Lévy, c’était au cours du printemps de 1939, dans son appartement de Paris, j’avais 11 ans.
Jeanne Lévy est née le 10 décembre 1873, à St Etienne, dans la Loire (42), au numéro 1 de la rue de Roanne, domicile de ses parents, Emile Lévy et Léonie Brach, où son père vendait des rubans. Jeanne et sa sœur Clémentine, ma grand’mère, née avant elle, en 1869, devinrent orphelines vers 1890, à la mort de leurs parents.
Les deux sœurs vécurent au début auprès de leur grand-père maternel, Joseph Brach, au 16 de la rue Lauriston, dans le 15° arrondissement de Paris, jusqu’à sa mort et ensuite auprès d’un de ses fils, Achille Brach, au 17 du Boulevard Haussmann, dans le 9° arrondissement de Paris.
Après, comme Clémentine s’est mariée en 1895, Jeanne a vécu ensuite avec elle au 7 de la rue Drouot, dans le 9°, jusqu’à son propre mariage en 1898.
Les bans de son mariage, avec Gustave Jacques Salomon, ont été publiés les 13 et 20 novembre 1898, le mariage civil eut lieu le 29 novembre 1898[1], suivi par le mariage religieux, à la Grande Synagogue de Paris, au 44, rue de la Victoire, dans le 9° arrondissement, le 1° décembre.
Gustave Jacques SALOMON, qui était né à Paris en 1867, exerçait la profession de grossiste en mouchoirs et il avait acquis la Maison Dennery, au 8 rue d’Uzès, dans le 2° arrondissement de Paris. Il avait servi dans la cavalerie pendant la première guerre mondiale et il mourut en 1943, au domicile familial que lui et sa femme n’avaient jamais quitté, au 165, rue de la Pompe, dans le 16°.
Ma mère, fille de Clémentine, devint très proche de sa tante Jeanne Salomon, parce que mes grands-parents maternels, Clémentine et son mari, décédèrent, laissant ma mère orpheline à 21 ans à peine. Jeanne et son mari devinrent alors des parents de substitution pour ma mère et des grands-parents pour moi. Ils organisèrent et rendirent possible la rencontre de mes parents et leur mariage.
Jeanne SALOMON était une grande couturière et elle voulait monter une fabrique de vêtements d’enfants, mais Gustave, son mari, ne le permit pas. Elle fabriqua nombre des premiers vêtements que mon frère et moi avons portés, y compris des culottes courtes. Elle était également une excellente photographe et avait son laboratoire de développement à la maison. La plupart de ses collections de photographies en relief, prises durant leurs nombreux voyages, ont pu être sauvegardées par la famille de mon oncle, Jean Lévy, qui habita dans le même appartement après la guerre et elles furent l’objet d’une donation au Musée Français de la Photographie de Bièvres.
Mon père avait essayé de convaincre Jeanne et Gustave de quitter la France en 1940 et 1941, mais leur sentiment fut qu’ils ne pouvaient, ou ne voulaient pas partir. Ils restèrent au 165, rue de la Pompe, avec comme seule protection, le bon vouloir des gens alentours.
Gustave mourut de pneumonie en janvier 1943, à l’âge de 75 ans et fut enterré au cimetière du Montparnasse, Jeanne demeura dans l’appartement, jusqu’à ce qu’elle fut dénoncée par la concierge, comme mes parents l’apprirent après la guerre.
Elle fut déportée par le convoi 77, le 31 juillet 1944.
Une plaque à sa mémoire a été apposée sur la tombe de sa sœur, qui repose au cimetière Montparnasse.
Le certificat de son décès fut publié le 2 mai 1946, par la mairie du 16° arrondissement[2], avec la mention « mort en déportation », portée en marge, suite à un jugement de 1998[3].
[1] Archives de Paris, Etat Civil : Certificat de mariage. Paris IX (75), 1898, page 9, n° 1167
[2] Archives de Paris, Etat Civil, Certificat de décès, Paris 16, n° 244, voir dossier 16D 165B
[3] 18 avril 1998 JOURNAL OFFICIEL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE, page 06021